— Sabine Sicaud —

Le petit cèpe

Les oranges

Pour bien connaître les oranges,
Il faut les avoir vues chez elles :
Aux îles Baléares,
En Sardaigne,
En Corse, en Algérie,
Dans l’air bleu doré,
L’atmosphère tiède de la Méditerranée.

Les oranges

Alphonse Daudet

Le petit cèpe

Va, je te reconnais, jeune cèpe des bois...
Au bord du chemin creux, c’est bien toi que je vois
Ouvrant timidement ton parapluie.
A-t-il plu cette nuit sur la ronce et la thuie ?
Déjà le soleil tendre essuie
Les plus hautes feuilles du bois...

Tu voulais garantir les coccinelles...
Il fait beau : Tu seras, jeune cèpe, une ombrelle,
L’ombrelle en satin brun d’un roi de Lilliput.
Ne te montre pas trop, surtout... le chemin bouge... Chut !
Fais vite signe aux coccinelles !

Des gens sont là, dont les grands pieds viennent vers toi :
On te cherche, mon petit cèpe !
Que l’ajonc bourdonnant de guêpes,
Le genièvre et le houx, cachent les larges toits
De tes aînés, les frères cèpes ;
Car l’un mène vers l’autre, et la poêle est au bout !

Voici qu’imprudemment tout un village pousse :
Rouget couleur de sang, verdet couleur de mousse,
Girolle au bonnet roux,
Chapeaux rouges, verts, blonds ; partout
Les toits d’un rond village poussent !

Depuis l’oronge en oeuf, le frais pâturon blanc
Doublé de crépon rose,
Jusqu’au méchant bolet qu’on appelle Satan,
Je les reconnais tous : les joyeux, les moroses,
Les perfides, les bons, les gris, les noirs, les roses,
Les cousins de l’humide automne et du printemps…

Mais c’est pour toi, cher petit cèpe, que je tremble !
Tu n’es encore qu’un gros clou bien enfoncé ;
Ta tête a le luisant du marron d’Inde, et lui ressemble.
Surtout, ne hausse pas au revers du fossé
Ta calotte de moine : on te verrait... je tremble !

Moi, tu le sais, je fermerai les yeux
Exprès, je t’oublierai; sous une feuille sèche,
Je t’oublierai, petit Poucet... Je ne puis ni ne veux
Être pour toi l’Ogre qui rêve de chair fraîche ;
Je passerai, fermant les yeux…

Dans mon panier, j’emporterai quelques fleurs, une fraise,
Rien peut-être… Mais toi sur le talus,
À l’heure où les chemins se taisent,
Levant ton capuchon, tu ne nous craindras plus.

Brun et doré, sur le talus,
Tu t’épanouiras en coupole, si ronde,
Si large, que la lune en marche, une seconde
S’arrêtera pour te frôler de son doigt blanc ; la nuit
Se fera douce autour de toi, bleue et profonde ;
Mignonne hutte sauvage... table ronde.

Pour les rainettes, dont l’œil jaune et songeur luit,
Mon cèpe, tu ne seras plus un clou dans l’herbe verte
Mais un pin parasol dans l’ombre où se concertent
Les fourmis qui toujours s’en vont en longs circuits;
Tu seras une belle tente, grande ouverte,
Où les grillons viendront chanter la nuit.

Sabine Sicaud

Portrait de Sabine Sicaud

Sabine Sicaud
“La petite elfe”
(1913 - 1928)

La Moitié de Poulet

— Où vas-tu, Moitié de Poulet ?
— Je vais chez le roi. Cent écus, me doit !
— Prends-moi avec toi.
— Du plaisir, en aurai. Entre dans mon cou, je t’y porterai.

La Moitié de Poulet

Jean Macé

Le portefeuille de Bixiou

— Ayez pitié d’un pauvre aveugle !
C’était si bien imité que je ne pus m’empêcher de rire ;
Mais lui, très froidement :
— Vous croyez que je plaisante ! regardez mes yeux !
Et il tourna vers moi
Deux grandes prunelles blanches sans regard.

Le portefeuille de Bixiou

Alphonse Daudet

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Fregate: une croisière sur le Conte & la Poésie.

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